Daniel

Aujourd’hui un homme s’est effondré devant moi dans la rue. Il s’appelait Daniel et quand les pompiers sont arrivés il ne savait pas leur dire quand il était né.

Il est tombé dans la largeur du trottoir, son gros casque Phillips a roulé dans la chute et est venu s’arrêter devant mes pieds. Il a cherché à parler, aucun son n’est sorti, et il s’est mis à pleurer.

Un étudiant a moi était là au même instant, un des étranges hasards de la vie, de se retrouver dans cette situation inattendue, bouleversante et si profondément humaine. Il a appelé les pompiers et je me suis accroupie sur le trottoir contre ce corps quasiment inerte sauf pour ses sanglots.

Je lui ai parlé, doucement, presque comme à un enfant, lui ai dit de ne pas bouger, de respirer, que j’étais là, que je restais avec lui jusqu’à l’arrivée des secours. Petit à petit il a retrouvé son souffle et il m’a dit son nom. Non,  il n’avait personne à contacter, il venait de Montperrin. A Aix, venir de Montperrin, tout le monde sait ce que ça veut dire. Ca veut dire habiter à l’hôpital psychiatrique, et vivre cette vie marginale, entre malade et bien portant, tantôt reclus derrière les hauts murs rouges et verts, tantôt demi errant dans les rues de la ville.

Alors, pour que la vie de Daniel et ses sanglots ne restent pas seulement un incident de trottoir, trop vite oublié, je lui écris ces quelques lignes à lui, et  à toutes ces existences si terriblement seules et si souvent méprisées.

Une réflexion sur “Daniel

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